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Des pixels au braille : CIRA contribue à créer un Internet plus sûr et inclusif pour les jeunes présentant une déficience visuelle

Par Caitlin Sears
Coordinatrice des subventions

Imaginez tenter de naviguer dans le vaste monde de l’Internet sans pouvoir le voir. Comment comprendre le concept de « vie permanente » sur l’Internet si l’on ne sait pas à quoi il ressemble? Comment participer efficacement en ligne de manière autonome et en toute sécurité lorsque l’Internet n’est pas accessible? Voilà les questions auxquelles l’équipe de l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) a voulu répondre avec sa subvention Net Good par CIRA.

INCA est un organisme sans but lucratif qui se consacre à la mise en œuvre de programmes novateurs et d’initiatives de défense des intérêts qui outillent les personnes touchées par la cécité. J’ai récemment eu l’occasion de m’entretenir avec Daniel Moore, directeur des partenariats avec les entreprises et les fondations, Becky Dyck, responsable du programme pour les enfants et les jeunes, et Kathy Beitz, responsable de l’application des connaissances, afin d’en savoir plus sur l’impact de ce projet et le soutien de CIRA.

Le projet a été inspiré par une personne qui participait aux programmes jeunesse d’INCA et qui a mis en évidence une grave lacune dans la formation aux compétences numériques. Cette jeune personne a observé que la divulgation d’un handicap en ligne peut entraîner des difficultés en matière d’emploi, de sécurité et d’inclusion sociale. On peut par exemple être la cible d’escroqueries ou faire l’objet de discriminations lorsqu’on postule à une offre d’emploi. Le conseil national des jeunes d’INCA a été consulté pour savoir s’il estimait qu’il convenait de fournir davantage de conseils sur l’accès aux espaces en ligne, et la réponse a été un « oui » unanime.

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C’est là qu’entre en scène le programme d’« Utilisation sécuritaire de l’Internet en cas de déficience visuelle », ou SIUSS, un programme gratuit, premier du genre et modulable, conçu pour enseigner aux jeunes Canadien·nes présentant une déficience visuelle comment accéder et participer au monde en ligne en toute sécurité. À l’heure où les enfants sont initié·es à l’Internet à un âge de plus en plus précoce pour l’école, les loisirs et les interactions sociales, des compétences telles que la gestion de l’empreinte numérique, la citoyenneté numérique et l’établissement de relations en ligne saines sont essentielles. Cependant, l’Internet est principalement conçu pour les voyant·es, et les programmes de sécurité en ligne destinés aux jeunes négligent souvent les besoins propres aux personnes présentant une déficience visuelle ou aveugles. « Il existait une lacune en ce qui concerne l’utilisation sécuritaire de l’Internet sous l’angle du handicap pour les jeunes en particulier », déclare Daniel.

Au cours de ses recherches, l’équipe d’INCA a recensé quatre grandes lacunes dans l’éducation à la sécurité en ligne pour les jeunes présentant une déficience visuelle et aveugles. Elles ont servi de base au programme d’études du programme SIUSS : la défense des droits (connaître ses besoins, savoir quand parler des problèmes liés à l’Internet et à qui s’adresser), l’accessibilité (ce qu’est l’accessibilité à l’Internet, comment savoir si un site est accessible et les solutions en matière d’accessibilité), la technologie d’assistance (vocabulaire, sensibilisation et pratique de l’utilisation et de la navigation en ligne de la technologie d’assistance) et le consentement et la divulgation (connaître et appliquer ses droits lors de l’utilisation de l’Internet).

Il s’agissait d’inculquer aux enfants le sentiment d’appartenance et le sens de la citoyenneté numérique, en encourageant la responsabilité dans l’utilisation de l’Internet. Comme le note Daniel, « cela leur donne un sentiment d’indépendance alors que leur monde est très contrôlé. »

Présenté sous forme de livret en ligne et en braille, le programme pilote SIUSS a déjà été présenté à 58 enfants de la maternelle au secondaire lors de la première série d’ateliers interactifs. Les sujets abordés comprennent la compréhension du vocabulaire de l’Internet, la pratique de l’autopromotion en ligne, l’exploration des caractéristiques d’accessibilité et la détection de la mésinformation en ligne. Becky fait remarquer que même si les participant·es étaient déjà familiarisé·es avec l’Internet, leurs connaissances étaient encore très incomplètes. « Un·e enfant peut savoir ce qu’est l’accessibilité sans qu’on ne lui ait jamais enseigné comment l’appliquer dans sa vie », précise-t-elle.

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Le programme propose des activités et des jeux attrayants basés sur des scénarios de la vie réelle afin d’apprendre en s’amusant. Dans le cadre d’une activité, il faut jouer le rôle d’animateur·rices de YouTube ou d’influenceur·ses de médias sociaux pour explorer les caractéristiques d’accessibilité des plateformes en ligne et de jeux. Dans le cadre d’une autre activité, les jeunes sont encouragé·es à s’arrêter et à réfléchir à des choix positifs concernant ce qu’ils/elles publient en ligne, en créant une capsule temporelle numérique de leur présence en ligne. Dans le jeu Is This the Real Deal (Est-ce vraiment vrai?), les jeunes utilisent des feux tricolores pour décider comment réagir à des scénarios impliquant de la mésinformation ou des sites Web suspects.

Le format décontracté des ateliers a favorisé des discussions animées entre les participant·es sur leurs propres expériences en ligne et leurs stratégies de résolution des problèmes. Un sondage a révélé que la plupart d’entre eux/elles ont retiré de précieux nouveaux concepts des ateliers. « Les compétences en matière de résolution de problèmes acquises grâce aux jeux peuvent être utilisées non seulement pendant l’enfance, mais aussi plus tard, dans le cadre d’un emploi ou d’études », déclare Daniel.

Le succès du programme et son caractère évolutif ont conduit à une large adoption dans l’ensemble des programmes d’INCA : les responsables des programmes pour les enfants et les jeunes dans tout le pays; le camp d’été d’INCA (Lake Joe) pour les personnes ayant une déficience visuelle; le programme national Académie d’apprentissage; et le programme d’emploi « Ouvrir les portes du travail » d’INCA qui aide les gens à apprendre à utiliser les technologies accessibles et à réussir sur le marché du travail.

Aujourd’hui, les jeunes présentant une déficience visuelle ou aveugles font face à un nouveau défi qu’INCA souhaite relever : l’intelligence artificielle (IA). « L’IA peut sembler réelle pour les personnes présentant une déficience visuelle puisqu’elles ne peuvent pas voir les signaux d’alarme », explique Becky. « C’est quelque chose que nous ne maîtrisons pas encore. Nous devons en informer les enfants. » Au fur et à mesure que la technologie évolue, INCA s’engage à adapter le programme SIUSS pour faire face à ces nouveaux risques, en veillant à ce que la prochaine génération dispose des outils nécessaires pour naviguer dans le monde en ligne en toute sécurité et en toute connaissance de cause.

 

CIRA accorde chaque année plus d’un million de dollars de financement à des initiatives d’infrastructure, de sécurité en ligne et d’engagement politique qui visent à améliorer l’Internet pour la population canadienne. En savoir plus sur nos bénéficiaires en 2024.

À propos de l’auteur
Caitlin Sears

Caitlin fait partie de l’équipe Net Good de CIRA en tant que coordinatrice des subventions. Elle a travaillé dans le secteur caritatif et se passionne pour le financement de l’équité numérique.

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